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.Ballade n° 4 en fa mineur
 
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Pièce écrite à Nohant en 1842 (7 ans avant la mort de Chopin).

        Expression d'une pleine maturité, cette œuvre est d'une incroyable richesse, que ce soit par l'incomparable beauté de chacun de ses thèmes, ou bien, comme pensait Alfred Cortot, à cause " d'une somptuosité harmonique, un raffinement d'écriture très significatif d'une nouvelle orientation du style de Chopin ". Mais aussi parce que l'inspiration de Chopin y est exceptionnelle et qu'on a rarement été plus loin dans la puissance expressive.  

        Les 7 mesures introductives en ut Majeur nous font entendre une mélodie très douce et juste un peu interrogative. Arrive alors le premier thème et nous sommes cette fois dans la tonalité fa mineur de la ballade. Malgré son calme apparent, on peut y ressentir déjà une passion contenue. Pourtant, cette mélodie presque murmurée est d'une grande tristesse quasi désabusée.  

Premier thème mes 8-12

    S'ouvre ensuite une courte parenthèse où les accords en octaves de la main gauche créent une atmosphère un peu plus grave et solennelle, contrastant avec le début.

    Puis, la main droite reprend le développement de son thème qui grossit peu à peu et prend de plus en plus d'ampleur pour arriver à un passage où la passion contenue du début peut enfin partiellement se libérer. Partiellement seulement car déjà une dernière montée jusqu'aux notes les plus aigus du piano et c'est le retour au calme avec l'exposition du second thème. Avec sa tonalité Majeur (si b), ce thème n'est pas empreint de la nostalgie du premier. Il évoque plutôt l'idée d'un balancement créant une sorte de mouvement perpétuel dont on n'a pas envie de se libérer tant la mélodie paraît paisible .

La suite nous y arrache pourtant par un développement particulièrement brillant et vivant.

        La reprise des quelques tendres mesures de l'introduction (cette fois en la Majeur) semble annoncer le retour imminent du 1er thème. Mais celui-ci se fait un peu attendre et désiré et quand il resurgit, c'est de façon bien surprenante : sorte de canon à 2 puis 3 voix, sautant d'une modulation à l'autre, d'abord ré mineur puis fa mineur et enfin la b mineur, le tout donnant à ce thème un aspect un peu angoissant et surtout déstabilisant. Mais cela ne dure que 10 mesures car enfin la mélodie reprend son énoncé normal, rassurant peut-être mais toujours mélancolique.

        Suit une variation du thème avec une série de fantastiques ornementations, sorte de sublimation du sentiment amoureux qui est ici l'affirmation d'un érotisme plus ardent mais pas encore pleinement exprimé.

        Retour du second thème. Si paisible lors de son 1er exposé, Chopin parvient à le métamorphoser radicalement avec l'arrivée progressive d'un grand et puissant crescendo. Passage bouleversant de passion parvenant enfin à plénitude sur cette envolée de gammes ponctuées par une série d'accords fortissimo.

        Et là, nouvelle et dernière surprise : toute cette puissance aurait pu déboucher immédiatement sur la coda. Au lieu de cela, Chopin nous accorde un délicieux répit avec ses 5 accords tout en douceur.

        Et cette fois c'est le dénouement de l'œuvre avec l'impressionnante coda, véritable déchaînement de triolets, accords de tierces chromatiques à la main droite, octaves à la main gauche : c'est une irrésistible vigueur qui conclue cette pièce commencée dans la plus grande tendresse.