Translation in English

 

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                Le projet d'un voyage à Vienne voit le jour, et il arrive pour la première fois dans la capitale autrichienne le 31 juillet 1829. La ville est chargée du souvenir de Mozart, Beethoven et Schubert. Il fait ses débuts dans le monde. On lui promet un grand avenir, pour peu qu'il accepte de donner un concert.
C'est chose faite, le 11 août. Le concert a lieu au " Kaernthnerthor Theater".

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Le Théâtre
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    Pour ce concert, Chopin doit improviser, l'orchestre n'arrivant pas à déchiffrer le rondo à la krakoviak. Il interprète également ses variations " La ci darem".
C'est un succès ! Il est plusieurs fois rappelé. Il est invité par Czerny et accueilli par le comte Lichnowski, le dernier ami resté fidèle à Beethoven.


Le 18 août il donne un second concert. Cette fois-ci tout se passe à merveille. L'orchestre interprète sans problème le rondo. La presse lui fait des éloges:

" un maître de premier ordre " .
On souligne la délicatesse de son toucher, le fini de ses nuances,
" le virtuose favorisé par la nature " .
À Varsovie la presse locale est peu enthousiasmée par ces succès étrangers.

Qu'importe! À cette date Chopin est amoureux ! Il écrit à son ami Titus:
        " C'est en pensant à elle que j'ai composé l'Adagio de mon concerto ...".
C'est son premier véritable amour, mais il n'ose le déclarer.
     Les comportements de Chopin sont assez paradoxaux. En public il a le trac, il est timide, délicat, réservé, mais il ne peut réfréné cet élan passionné que l'amour éveille en lui. La disproportion est si franche que l'on peut se demander, si Constance, si vite oubliée par la suite, ne fut pas le prétexte à l'essor de ce lyrisme.
        De retour à Varsovie, Frédéric se lie d'amitié avec de nombreux jeunes polonais de sa génération. Ils partagent tous le même sentiment de rébellion envers les russes.  Les jeunes gens se retrouvent souvent dans un café, et discutent de politique.


        À partir de 1829-1830 ils se rencontrent de plus en plus souvent en compagnie de jeunes poètes dont Stefan Witwicki et Bohdan Zaleski nés tous les deux en 1802. À cette époque l'idée de progrès artistique ne pouvait se concevoir sans un engagement politique.
        Les rencontres se poursuivent souvent, au domicile d'un des participants et on lit de la poésie lorsque Chopin ne joue pas du piano. En 1830 Witwicki publie un petit recueil de poèmes " Les chants bucoliques ".
        Chopin est tellement impressionné par leur esthétique, qu'il décida de composer ses premières mélodies sur les poèmes de Witwicki.
        En parfaite harmonie avec le texte, il composa une musique simple et sans prétention en se basant sur des thèmes puisés dans le folklore polonais. Il fit de même quelques années après, sur les poèmes de Zaleski et Mickiewicz.    
        Pendant ce temps il pense à faire sa rentrée à Varsovie, en donnant deux concerts. Le premier a lieu le 17 mars 1830 au Théâtre National.
L'effet sur le public, n'est pas à la hauteur des espérances de Chopin,
mais la presse mit en lumière le caractère folklorique des thèmes et l'intérêt national de cette musique.
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Chopin au piano (1826)
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 Un deuxième concert a lieu cinq jours plus tard, avec le même succès.
Le 11 octobre 1830 il donne son dernier concert à Varsovie, et interprète le concerto en mi mineur. Il part le 2 novembre 1830.
Il ne reverra plus son pays.

Une semaine après son arrivée à Vienne, l'insurrection éclate à Varsovie. Malgré son envie de rentrer en Pologne Chopin reste à Vienne. Il continue de penser à Constance. Un soir, torturé par la jalousie et la certitude de perdre son temps il se rend à la cathédrale St Étienne, sans doute pour prier.


Le Scherzo en Si mineur exprime ce déchirement.
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Il se retrouve seul, et il ressent l'hostilité de la population croître contre son pays. Peu à peu se dessine l'idée d'un voyage à Paris.

 Ayant obtenu l'autorisation qu'il attendait, il quitte Vienne le 20 Juillet 1831, gardant de ses huit mois passés à Vienne, un sentiment d'échec personnel. Il passe par Linz et Salzbourg, puis Munich. Les nouvelles de son pays sont mauvaises. L'insurrection se meurt. En arrivant à Stuttgart, il apprend l'écrasement de l'insurrection, la prise et le sac de Varsovie par les troupes russes, le 18 septembre 1831.
" Que ne puis-je au moins tuer un moscovite ! "
La légende dit qu'en apprenant la nouvelle il se mit au piano et improvisa ce qui devait devenir l'étude révolutionnaire.
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Étude op 10 n° 12 " révolutionnaire"
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Il écrit encore à Titus, son ami d'enfance: " Que les tortures les plus cruelles tourmentent les Français qui ne nous ont pas secourus ! ".

Accablé de chagrin et de désespoir, il part pourtant pour Paris !